Jordanie / Syrie : guerre civile, frontière militarisée et camps de réfugiés de Zaatari

Dans un Proche et Moyen-Orient bouleversé - et souvent ravagé - par les conflits, les guerres civiles et les rivalités de puissances, régionales ou mondiales, la Jordanie est dans l’œil du cyclone en étant frontalière avec Israël, la Syrie, l’Irak, l’Arabie saoudite et l’Egypte. Dans ce cadre régional, la guerre civile en Syrie s’est traduite depuis 2011 par l’arrivée massive de réfugiés syriens. Ce conflit et ses conséquences dramatiques se sont traduits dans la région septentrionale du pays, en particulier autour de la ville de Mafraq, par une arrivée massive de réfugiés dont une partie est logée dans le camp de Zaatari. Face à cette crise, la région frontalière a été bouleversée alors que dès 2013 les frontières jordaniennes avec la Syrie et l’Irak ont progressivement été fermées puis sécurisées par des barrières financées par les Etats-Unis afin d’assurer la sécurité du pays.

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Légende de l’image

Cette image à la frontière entre la Jordanie et la Syrie  a été prise par le satellite Sentinel 2A le 26 mars 2020. Il s’agit d’une image en couleurs naturelles de résolution native à 10m.

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Repères géographiques

Présentation de l’image globale

Une région frontalière bouleversée par les conséquences
de la guerre civile en Syrie

Un système continental juxtaposant des milieux très différents aux limites du désert.

Prise en mars 2020 au début du printemps, cette image couvre la région frontalière entre le sud de la Syrie, qui se trouve en haut, et le nord-est de la Jordanie, qui s’étend sur le milieu et le bas. Deux ensembles naturels ransfrontaliers très différenciés et bien visibles organisent cet espace en deux bandes parallèles d’orientation nord/sud.

Le tiers ouest de l’image appartient au piémont oriental qui descend des hautes terres du Plateau de Jordanie dominant le bassin d’effondrement du Jourdain. Ces hautes terres occidentales sont bien arrosées, puisqu’elles reçoivent environ 500 mm d’eau par an. Elles font donc figure de « château d’eau » en étant drainées à l’ouest (hors image) par le bassin du Yarmouk, un fleuve qui joue un rôle majeur dans l’alimentation d’Irbid, mais surtout d’Amman et de Zarqa.

Cet espace apparaît plus accidenté et encore relativement boisé. S’y développe en particulier une agriculture méditerranéenne traditionnelle combinant cultures (céréales, arboriculture, oliviers…) et terrains de parcours pour le bétail (moutons…). Relativement riche, cet espace porte des villes ou gros bourgs importants comme Irbid, Ramtha, Jerash ou Zarqa. Le governorat d’Irbid, au coin nord-est, est la seconde région la plus peuplée de Jordanie, après Amman la capitale, avec des densités élevées (1.100 hab/ km²). Du côté syrien, il tombe encore 250 mm par an à Deraa dont la région compte encore 280 hab/km².

Par contre, la partie centrale et orientale de l’image se rattache aux marges occidentales du Désert de Syrie, un vaste  hamad constitué d’une table très sèche de calcaires et de marnes secondaires et tertiaires. Surtout, celui-ci constitue un vaste espace désertique ou semi-désertique de plus de 500.000 km partagé entre la Jordanie, la Syrie, l’Irak et l’Arabie saoudite et qui s’enfonce comme un coin dans le fameux « croissant fertile ». Les vastes tables topographiques s’étagent sur l’image entre 400 et 700 m d’altitude. On y trouve en particulier de grands ensembles basaltiques au nord-est de Mafraq du côté syrien. Cette région relativement élevée (1.765 m) constitue le Djebel Druze - recolonisé à partir du XVIIem siècle par la population druze en excès au Liban - qui sert donc traditionnellement de montagne-refuge, un système spatial et géopolitique que l’on retrouve dans une large partie du Proche et Moyen-Orient.
 
Dans cette région d’abri, la rigueur du climat désertique est renforcée par la continentalité. Ainsi, elle se caractérise par un climat semi-aride froid : les étés sont chauds ou très chauds (moyenne de 32°C en juillet/aout) et les hivers froids (2°C à 3°C en décembre - janvier). Surtout, les précipitations sont de plus en plus faibles d’ouest en est : il tombe seulement 180 mm à Mafraq, mais rapidement moins de 100 mm puis moins de 50 mm plus à l’est. La situation est d’autant plus tendue que cette zone de steppe fait face à des variations interannuelles très marquées, c’est à dire de l’ordre de 25 % à 50 %. A ceci s’ajoute une distribution des pluies très aléatoires durant la saison agricole. Dans ce dernier governorat de Jordanie qui couvre administrativement toute la zone frontalière désertique du Nord-Est, la densité tombe à moins de 10 hab./km². Comme le montre l’image, la région est dominée par des oueds aux structures endoréiques.  

Sur l’image, la steppe domine sur l’axe Mafraq/Zarqa et sur la zone frontalière avec la Syrie. Puis plus à l’est et au sud-est débute le désert – ou Badiya - qui couvre 90 % du pays. La région de Mafraq est au plan agricole dominée par les cultures sèches de zone aride (ou dry farming) et l’est désertique par les pâturages très extensifs. Nous sommes là au contact entre deux grandes aires de civilisation du Proche-Orient, au contact entre mondes sédentaire et nomade. Les systèmes et identités tribales, issus des puissantes tribus bédouines, y ont longtemps joué un rôle majeur dans les organisations sociales.        

 Au total, ces marges steppiques sont sous la menace permanente de l’aridité. Face au désert ou à la steppe, l’irrigation joue donc un rôle essentiel dans le développement des périmètres agricoles, bien visibles par exemple le long de la frontière du côté jordanien dans l’est de l’image. Dans cette région en stress hydrique marqué, la concurrence pour le partage de ressources limitées est un enjeu majeur alors que la multiplication des pompages épuise les nappes phréatiques. L’organisation de ceux-ci explique la véritable marqueterie paysagère qui apparaît sur l’image, aux échelles locales en particulier.  Dans ce contexte, les quatre gouvernorats du nord de la Jordanie sont approvisionnés en eaux, pour partie, et en électricité par la Compagnie des eaux du Yarmouk, situé plus à l’ouest (hors image).

Cette région, en position périphérique dans les deux constructions nationales syrienne et jordanienne, cumule donc de nombreux handicaps. Si les données du côté syrien sont bien sur inexistantes du fait du conflit, le governorat de Mafraq fait partie des régions les plus pauvres et retardataires du Royaume jordanien au plan économique et social.  
   
Une région stratégique traversée par un grand axe Nord/Sud

Pour autant, cette région intérieure - au contact des plateaux occidentaux et des déserts orientaux – constitue depuis l’Antiquité dans cette région du Proche-Orient un grand axe de passage Nord/Sud. Ainsi, Deraa - ville 98.000 habitants avant la crise – est fondée par les Cananéens et mentionnée dès -1490 av. JC dans les sources égyptiennes.

Durant l’Empire ottoman, les autorités y construisent avec l’aide de l’Allemagne le fameux Hezaz Railway, le grand chemin de fer qui va d’Istanbul à Médine via Damas. Cet axe logistique garde aujourd’hui encore toute son importance avec le grand axe routier de la M5 qui relie Damas, la capitale de la Syrie au nord, à Amman, la capitale de la Jordanie au sud. Le poste frontalier sur la M5 est équipé de chaque côté par deux importants postes de contrôle bien visibles sur l’image (cf. zoom).

Du fait de sa position stratégique, les autorités britanniques installent à Mafraq dès 1920 une importante base et un aéroport militaires. On voit encore clairement la piste sur l’image satellite puisque c’est celle de la King Hussein Air Base. Cette base est complétée en 1978 par l’installation de l’Ecole Miliaire de l’Aviation jordanienne. Cette grande ville de garnison est complétée par la présence de la 3ème Division Jordanienne de l’Armée de Terre. Ces unités joue un rôle stratégique majeur dans le système défensif et frontalier d’avec la Syrie et l’Irak, deux Etats visons en pleine crise.

La frontière Jordanie / Syrie : une interface frontalière entre deux trajectoires étatiques

Sur l’image, le tracé de la frontière entre les deux Etats est particulièrement visible de l’espace et on en suit facilement le tracé. Elle fonctionne comme une interface entre deux Etats voisins aux trajectoires géoéconomiques et géopolitiques bien différenciées s’inscrivant dans des systèmes géostratégiques opposés.

Située à 13 km de la frontière jordanienne et à seulement 90 km de Damas, la ville de Deraa est à l’origine en 2011 du « printemps syrien » lorsque sa population se soulève à la suite de l’exécution d’un groupe de jeunes. Puis elle devient durant la guerre civile un des pôles des troupes rebelles du Front Sud de l’Armée Syrienne Libre. Le sud du pays est donc l’objet de combats sanglants, Damas voulant à tout prix sécuriser sa zone frontalière méridionale et retrouver le contrôle de l’axe routier stratégique entre Amman et Damas. Il faut cependant attendre juillet 2018 pour que les troupes du régime de Bachar El-Assad avec l’aide de l’aviation russe reprennent le contrôle de cette région.

Au printemps 2020, tout le sud et le centre utile de la Syrie est contrôlé par le régime, l’essentiel des combats se déroulant au nord autour de la poche d’Idlib et sur les enclaves frontalières tenues par l’armée turque et ses alliés (Afrin, Tel Abyad, Ras al Ain). Dans le sud, seule la poche d’Al-Tanf, sur la frontière entre la Syrie, la Jordanie et l’Irak, située bien à l’est de l’image (hors image), est encore tenue par des forces rebelles dont des djihadistes. Mais si le régime de Damas contrôle des deux tiers du territoire et la plus grande partie de la population, il demeure très dépendant de ses soutiens russes et iraniens alors que la reconstruction d’un pays en ruine est estimée à plus de 250 milliards de dollars.  

La frontière jordano-syrienne  vit au rythme des rapprochements et des tensions entre les deux pays. Lors de la guerre en Irak en septembre 1980, les troupes se massent à la frontière alors qu’Amman soutient l’Irak et la Syrie l’Iran. Dès 2013, les frontières jordaniennes avec la Syrie et l’Irak sont progressivement fermées puis sécurisées par des barrières financées par les Etats-Unis, afin de bloquer en particulier l’entrée de commandos ou de réfugiés radicalisés (cf. assassinat d’un pilote jordanien par l’Etat islamique en janv. 2015). Cette militarisation de la frontière se traduit très bien sur l’image par la création d’un « mur » et d’un no mans’ land de plusieurs centaines de mètres de large qui coupe les liens traditionnels d’interactions et d’échanges aux échelles locales et régionales sur des centaines de kilomètres.      

Pays pauvre, semi-désertique, sans ressources naturelles et peuplé de 10 millions d’habitants, la Jordanie demeure sous sa stabilité apparente un pays fragile alors qu’elle est coincée entre Israël, le Liban, la Syrie, l’Irak et l’Arabie saoudite. Reposant sur une économie  de transferts, la Jordanie est très dépendante des remises des migrant (15 % PIB) et du tourisme (13 % PIB). Mais surtout, les bailleurs de fonds que sont les Etats-Unis, les pays du Golfe et l’Union européenne jouent un rôle central pour maintenir le régime d’Amman sous perfusion depuis les années 1990 et l’ancrage de la Jordanie au système occidental. En effet, le traité de paix signé avec Israël le 26 octobre 1994 puis le mouvement de libéralisation économique des années 1999/2012 signifient un approchement géostratégique avec les Etats-Unis et les pays occidentaux. Pour autant, la société est traversée par de fortes tensions internes (Palestiniens environ 50 % de la population, montée des mouvements islamistes et des Frères musulmans). A cet égard, la réaction très vive au printemps 2020 du Roi Abdallah au projet israélien – soutenu par le Président Donald Trump - d’annexion des territoires palestiniens sous occupation est emblématique des difficultés à trouver le bon équilibre dans un Proche et Moyen-Orient qui demeure un baril de poudre.

Une frontière protectrice : guerre civile, recherche d’un abri et crise des réfugiés syriens

Si de nombreux auteurs mettent en avant sur un registre parfois négatif le rôle de barrière que constituerait la frontière, il convient comme le fait le géographe et ancien diplomate Michel Foucher d’en souligner ici la fonction protectrice. Dans cette région, le passage de la frontière entre la Syrie et la Jordanie signifie pour les Syriens qui fuient la guerre civile et son cortège d’atrocités l’entrée dans un espace qui constitue pour eux à la fois un salut et un refuge. Car dans le cas présent, cette frontière cristallise au plus haut point dans l’espace l’exercice de deux souverainetés étatiques territorialisées, la jordanienne et la syrienne.

En effet, du fait de sa position nodale dans la région et de la stabilité de son régime, la Jordanie a déjà une longue tradition de pays d’accueil de réfugiés avec les Palestiniens à partir de 1948, les Irakiens dans les années 1990 et les Syriens aujourd’hui. Alors que plus de 13 millions de Syriens ont fuit ces dernières années leur pays, 5,6 millions se réfugient dans les pays voisins selon les données de mars 2020 du Haut Commissariat au Réfugiés (HCR) de l’ONU, dont 1,76 million en Turquie, 792 000 au Liban, 473 300 en Jordanie et 378 200 en Irak. Ces données doivent cependant être prises avec prudence dans la mesure où elles ne portent que sur les Syriens officiellement enregistrés par le HCR. En 2017, les autorités jordaniennes estimaient ainsi les Syriens présents sur son sol à 1,3 million de personnes en comptant les clandestins, contre seulement 658 000 pour le HCR, soit un rapport de 1 à 2.     

Avec la montée de la crise humanitaire en Syrie, l’accueil des réfugiés dans la région va sensiblement évoluer comme l’étudie la géographe Myriam Ababsa de l’IFPO. En 2011/2012 prévaut initialement un accueil assez généreux et informel dans les villages et les petites villes des districts de Mafraq et d’Irbid en mobilisant les réseaux familiaux ou interpersonnels transfrontalier tissés avant le conflit. Mais face à l’explosion des flux, une stratégie d’accueil est mise en place en urgence soit dans des petits lieux de transit (King Abdullah Park, Cyber City), soit dans des camps de plus grande taille comme celui de Zaatari (zoom 1) ouvert par le HCR en juillet 2012 puis, du fait de sa saturation, dans celui d’Azraq ouvert quelques dizaines de kilomètres au sud-est (hors image) en 2014 ou celui géré par les Emirats Arabes Unis. Les camps de rétention d’Hadalat et de Rukban ouvert au nord-est (hors image) en juillet 2014 pour les réfugiés entrés irrégulièrement sur le territoire jordanien sont ensuite fermés avec la fermeture de plus en plus hermétique de la frontière et leurs migrants redistribués. Si à l’automne 2018, la réinstallation des autorités de Damas dans le sud de la Syrie laissait espéré à Amman un retour massif des réfugiés syriens, il n’en a rien été du fait des conditions économiques et sécuritaires dramatiques (cf. enrôlement de force dans une armée syrienne saignée à blanc).

Zooms d’étude

Le poste frontalier sur le grand axe Nord-Sud  de la M5

L’image couvre la zone frontalière organisée par le grand axe routier Nord-Sud que constitue la M5 entre Amman au sud et Damas au nord. Du fait de son importance logistique et de l’important trafic routier, en particulier les poids lourds, passant par celle-ci, les deux Etats ont construit deux grands postes de contrôle douanier de part et d’autre de la frontière. 

Depuis 2013, le tracé frontalier entre la Jordanie et la Syrie a été progressivement fermé puis sécurisé par des équipements financés par les Etats-Unis. On en voit très bien depuis l’espace de tracé relativement rectiligne qui coupe les anciens liens locaux qui unissaient la région frontalière. Les anciens chemins et les anciennes toutes sont barrés, alors qu’une route double la barrière au sud en la suivant de manière parallèle. Elle permet aux forces de sécurités jordaniennes de patrouiller le long de la frontière. 


Zoom 1


Repères géographiques

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La région de Mafraq : les bases militaires et le camp de réfugié de Zaatari

Mafraq : une préfecture frontalière fortement militarisée
 
Cette image couvre la région septentrionale et orientale de la ville de Mafraq qui se trouve à l’ouest de l’image. Située sur un vaste plateau à 700 m d’altitude, celle ville préfecture du governorat est à environ 80 km d’Amman et est peuplée avant la crise par 
56.000 habitants. Comme nous l’avons vu, elle joue un rôle majeur dans la sécurité du Royaume de Jordanie en étant une importante ville de garnison accueillant une importante base militaire, fondée par les Britanniques dans les années 1920, et des unités de l’Armée de Terre. Si on retrouve là la spécialisation fonctionnelle traditionnelle des villes frontalières, la situation de guerre et de conflit en Syrie et en Irak, les deux Etats frontaliers du Nord-Est du pays et du governorat de Mafraq, en explique sa forte et active militarisation actuelle.       

Pour autant, cette région périphérique, qui est une des plus pauvres du Royaume, a bénéficié ces dernières décennies d’un relatif dynamisme. On relève en particulier la présence d’une petite université au sud de la base aérienne et quelques établissements industriels au nord de celle-ci. Mais l’image témoigne surtout de la forte présence des parcelles irriguées dont le vert en cette période printanière ressort bien sur l’image. Ces équilibres vont être largement rompus avec la guerre civile en Syrie qui va chasser vers la Jordanie des centaines de milliers de Syriens. En 2016, on estimait que 50 % de la population régionale était composée de réfugiés syriens.
    
Le camp de réfugiés syriens de Zaatari

Situé à une douzaine de kilomètres seulement de la frontière syrienne, le camp de réfugiés de Zaatari est bien visible sur l’image où il forme une grosse amande blanche. C’est en Jordanie l’un des trois camps du Haut Commissariat aux Réfugiés (HCR) de l’ONU et le plus grand par sa superficie (5,2 km²). Ouvert en juillet 2012, il compte 200 000 réfugiés en 2013, ce qui en fait alors la quatrième « ville » du pays. Au total, entre juillet 2012 et août 2017, on estime que 460 000 réfugiés y sont passés. Mais il n’accueille plus en août 2017 que 80 000 réfugiés, originaires pour beaucoup de la région voisin de Daraa et du Sud de la Syrie.

Son plan orthogonal du camp (cf. carte) répond à des exigences fonctionnelles (prévention des incendies, gestion sanitaire…) et sécuritaires  (contrôle des réfugiés…). Son bâti se durcit progressivement, en passant des tentes aux caravanes puis aux préfabriqués. Il devient une « vraie ville » en étant doté d’un hôpital, de 32 écoles qui accueillent 18 000 élèves inscrits en avril 2020, un supermarché, de multiples petits commerces et 27 centres communautaires. Il se structure progressivement au fur et à mesure de son induration sur de nouvelles dynamiques sociales avec des réfugiés se regroupant souvent géographiquement à l’intérieur par affinités familiales ou villageoises.
Cet apport brutal de population posa et pose encore de redoutables problèmes de gestion et d’intégration. En 2013, plus de 3.000 m3 d’eau potable sont ainsi livrés chaque jour aux 200.000 réfugiés présents. Dans cette région frontalière fragile, les réfugiés sont parfois accusés de doper les prix immobiliers, de concurrencer les salariés jordaniens en travaillant illégalement dans le bâtiment, l’agriculture et les services…

Très dépendants de l’aide humanitaire, la bonne intégration des réfugiés pose de redoutable problème de ressources financières autonomes et d’emplois (accès à un permis de travail…). Actant la présence sur son sol des réfugiés Syriens dans la durée, la Jordanie fournit entre 2016 et 2020 environ 200 000 permis de travail à ceux-ci. D’autant que selon les Nations unies, 78 % des réfugiés syriens vivant en dehors des camps sont sous le seuil de pauvreté, et que 60 % des réfugiés en âge de travailler sont au chômage en mars 2020. Au printemps 2020, la crise sanitaire du Covid-19 met l’économie jordanienne à genoux, du fait en particulier de l’effondrement des transferts des migrants et des flux touristiques, et Amman est contraint de se tourner à nouveau vers ses principaux bailleurs pour faire face à ce nouveau choc structurel.  


Zoom 2


Repères géographiques

Image complémentaire

Carte complémentaire : le camp de réfugié de Zaatari en 2017
Source : Laura Monfleur, https://www.lesclesdumoyenorient.com/Les-refugies-syriens-en-Jordanie-2-...

D’autres ressources

Bibliographie

Ababsa M., 2015, « De la crise humanitaire à la crise sécuritaire. Les dispositifs de contrôle des réfugiés syriens en Jordanie (2011-2015) », Revue européenne des migrations internationales, Vol. 31, n°3 et 4, p. 73-101.
(un dossier très complet)
https://journals.openedition.org/remi/7380

Ababsa M. (ss direct.) : Atlas de Jordanie, IFPO – Institut Français du Proche-Orient. (Un très bel atlas en ligne sur la Jordanie)
https://books.openedition.org/ifpo/4859

Monfleur L., 2017, Les réfugiés syriens en Jordanie, Site Les Clés du Moyen-Orient.
https://www.lesclesdumoyenorient.com/Les-refugies-syriens-en-Jordanie-2-...

Foucher M., 2020, Les frontières, Documentation photographique, n°1/2020, CNRS Editions, Paris.  

Roussel C., 2015, « La frontière syro-jordanienne dans le conflit syrien : enjeux sécuritaires, gestion frontalière », L’Espace Politique [en ligne], Vol. 27, n°3, http://journals.openedition.org/espacepolitique/3658.


Site de l’UNHCR : http://www.unhcr.org/.

Pour une vision d’ensemble à l’échelle du Moyen-Orient : http://data.unhcr.org/syrianrefugees/regional.php.

Contributeur

Laurent Carroué, Inspecteur générale de l’Education nationale

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